jeudi 12 novembre 2020

Limitez les contacts, mais n’oubliez pas de toucher !


            « Pas de contacts », « sans contacts », « limitez les contacts », « appliquez les distance »: avec la pandémie, ces mots sont devenus virulents dans les journaux, newsletters et annonces en tous genres. À chaque fois que je les lis, ils me font l’effet d’un coup de marteau sur la tête, le coup de trop qui enfonce dans la solitude: « pas de contacts », « maintenez les distances ».

            Le covid, comment ça s’attrape ? Je ne sais pas, il me suffit d’entendre ce mot, ainsi que tous ceux qui y font référence, pour que cela me rende malade. Il me suffit d’entendre ces deux syllabes pour que j’ai envie de les déglutir.

            Alors, dans ce contexte si particulier, je me suis prise à réfléchir à ce que signifie le mot « contact ». Du verbe latin « tangere », qui a aussi donné « contagion », il signifie très littéralement : « avec toucher ».

            « Avec toucher ». Dans le domaine artistique, on dirait plutôt « avec doigté », désignant ainsi la dextérité du pianiste ou la sensibilité du cuisinier qui a su ajouter à son plat le tout petit rien qui manquait. « Avec toucher »: c’est ajouter ce tout petit rien dans la vie de l’autre qui lui permette de se sentir aimé. « Avec toucher », cela signifie aussi « avec tact »: c’est le même mot. De mon côté, il s’agit encore d’une qualité à développer.

            Prenons maintenant ces mots dans l’autre sens: « toucher avec ». Il existe d’innombrables manières de savoir toucher: toucher avec la tête, toucher avec le cœur, il dit oui à ceux qu’il aime, il dit non au professeur. Ah zut ! Je viens de citer du Prévert ! Ce n’était pas le bon sujet. Cela dit, il est tout à fait possible de toucher avec une poésie offerte, avec une toute petite pointe de tendresse ou encore le tracé d’une lettre. Il est possible de toucher ses proches avec un sourire, avec un bouquet de fleurs installé sur la table (surprise !), avec un café pendant le petit-déjeuner ou un zeste d’humour.

            Toucher avec des chaussettes ! Eh oui, le coronavirus ne m’a pas encore paralysé les doigts. Si je sais tricoter, alors je peux offrir. Je peux aussi toucher avec un morceau de musique (en direct, pour mes colocataires, ou mis en ligne), je peux touchez mes proches avec de la peinture ou des brownies. Je peux toucher avec de l’amour ou de l’amitié. Même à distance, c’est facile !

            Il reste tant de belles manières de toucher sans contagion. Dans la nature, le soleil apporte chaleur et lumière (eh oui, même en hiver !) sans être tout proche, à nos côtés. Et moi, arriverai-je à être un petit rayon de soleil pour les gens qui ont besoin d’une présence, d’un peu de courage ou de gaieté ?

            Dans l’évangile de Matthieu, nous trouvons ces versets splendides qui disent: « Vous êtes le sel de la terre, vous êtes la lumière du monde ». En tant que « chrétienne », « Limiter mes contacts » ne me dispense pas de ce devoir de sel ou de lumière. Cela vaut au moins la peine d’essayer. En ce temps de pandémie, dans cette deuxième vague qui, pour beaucoup, ronge un peu plus le moral que la première, je me permettrais d’apporter une petite variante aux mesures sanitaires: « Limitez les contacts », mais continuez de toucher, « maintenez vos distances » sans oublier de transmettre ces petites étincelles de joie et d’amitié.

                                                                                 Stella, 12.11.2020.


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