vendredi 25 février 2022

Entrer dans le silence

Autant que possible, j'essaie de me ménager des temps de retraite dans des monastères ou des jours de marche sur le chemin de Compostelle. Pourquoi ? Pour entrer dans le silence.

Le silence : un élément de mon équilibre que j'apprécie, dont j'ai besoin. Dans le silence, il ne s'agit pas seulement de se taire avec sa bouche, mais aussi avec son téléphone, ses emails et les réseaux sociaux.  En d'autres termes : ralentir son rythme de vie. À ce sujet, j'aime beaucoup la réflexion de Pierre Palmade qui, dans le cadre de l'émission "Rendez-vous en terre inconnue", est immergé dans la vie des touaregs au Niger. Face à la tranquillité du désert, il explique ceci au présentateur :

"Je m'épate moi-même de ne rien faire et que cela ne m'angoisse pas. [...] Moi, je suis speed de nature et si je ne fais pas quatre choses par seconde, j'ai l'impression que je perds ma seconde. Et là, franchement, si tu es speed, ici, tu passes vraiment pour un con. [...] S'énerver pour quoi ? Speeder pour quoi ? Appeler qui ? Monter quel spectacle ? [...] Les petites choses qui ne se passent pas... Ce qui ne se passe pas devient un événement. C'est un événement que le temps passe. Et puis ce n'est pas grave que le temps passe, mais tu ne perds pas ton temps."

De même pour moi, quand j'entre dans le silence, je sens tout mon rythme de vie qui se ralentit : "S'énerver pour quoi ? Speeder pour quoi ? Appeler qui ?" À la façon d'une cure de détox, je me débarrasse des bruits ambiants et je me détoxifie. Par là-même, je fonctionne plus lentement. J'ouvre un espace dans mon coeur et dans ma tête pour "regarder le temps qui passe" sans le perdre, pour m'émerveiller, pour laisser de la place à l'inattendu, pour me laisser la place de respirer.

 

                              Se laisser de la place pour respirer
 

Le silence, ce n'est pas seulement se taire avec sa bouche, c'est aussi ralentir son esprit, ralentir ses pensées. Quand je pars en retraite silencieuse dans un monastère, les paroles ne sont pas interdites. Non ! Par exemple, les convives ont toujours le droit de s'adresser la parole pour se passer le sel à table (ce qui est beaucoup mieux que de mouliner des bras pour se faire comprendre). Ici, le silence est plutôt une disposition intérieure : une disposition de paix, de tranquillité, une aptitude à être attentif aux autres et à l'Autre, c'est-à-dire à Dieu, Celui qui nous dépasse.

Dans le silence, tout devient plus intense. Je prends conscience de chacun de mes gestes. Je prends conscience de mon propre souffle qui s'élève et s'adoucit dans ma poitrine. Même "ce qui ne se passe pas devient un événement." C'est dans ce cadre-là que je deviens plus réceptive à la présence de Dieu, le Dieu qui s'appelle YHWH. En hébreu, ce nom est un imprononçable. Il veut dire "J'étais", "Je suis", "Je serai", le fondement de toute existence. 

Dans le silence, tout devient plus intense. Je suis plus réceptive à l'Esprit : l'Esprit qui s'appelle "souffle" (pneuma en grec): le souffle qui me traverse et qui porte tout le vivant. Et c'est dans le silence que je suis plus réceptive au Christ : le Christ qui est être humain, comme moi, comme tous les êtres qui m'entourent. Ce Christ qui a porté la réalité d'un corps, qui a vécu la réalité du souffle, qui a vécu la réalité de Dieu.

Entrer dans le silence

Autant que possible, j'essaie de me ménager des temps de retraite dans des monastères ou des jours de marche sur le chemin de Compostell...